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Enseignement supérieur, Culture

Création littéraire : le Master très prisé au Havre

Depuis sa création en 2012, le Master de Création littéraire de l’ESADHaR au Havre voit régulièrement naître et être publiés de nouveaux auteurs sortant de cet apprentissage mêlant littérature et art. Frédéric Forte, responsable de cette formation, nous confie les secrets de cet enseignement d’exception.

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L'une des premières formations en création littéraire de France

Le Master Création littéraire du Havre est né en 2012 sous l’impulsion de Thierry Heynen, le directeur de l’ESADHaR (École supérieure d'art et design Le Havre-Rouen).

« Ayant eu un parcours d'artiste, il s'est un jour demandé pourquoi n'existaient pas d'écoles des "Belles-Lettres" comme il en existe des "Beaux-Arts". Après en avoir parlé avec le prédécesseur d'Élisabeth Robert-Barzman, actuelle directrice de l'UFR Lettres et Sciences humaines, Thierry Heynen a conçu une maquette d'enseignement », explique Frédéric Forte.

« C’est un Master doublement chapoté. Il y a d’un côté l’enseignement universitaire qui concerne un apprentissage théorique, de fond. Et puis il y a le propre de l’enseignement d’une école d’art comme l’ESADHaR avec le défi de la recherche, de l’exploration qu’on retrouve dans l’art contemporain », détaille le poète, membre de l’Oulipo.

 

Les quinze meilleurs talents retenus

Toute l’année, des auteurs et écrivains réputés interviennent et suivent les élèves du Master dans la construction de leur projet littéraire. La pluralité des regards et des thématiques lors des ateliers d’écriture permet aux élèves d’apprécier différentes techniques de travail et de développer la leur. « Les étudiants viennent de toute la France.

Cette année, par exemple, sur 90 candidatures, nous avons retenu seulement les quinze meilleures », développe Frédéric Forte. D’âges et de formations variées, ces étudiants s’alimentent de la recherche, des essais et de l’ouverture d’esprit qu’offre ce Master. « On les pousse à ne pas simplement écrire comme ils savent déjà le faire. L’échange entre les auteurs et ces futurs écrivains permet cela. Il n’y a pas de rapport maître à élève. Chacun apprend quelque chose à l’autre », détaille l’enseignant.

 

La rencontre d’une œuvre littéraire avec le monde de l’édition

Cette année, seulement six mois après leur diplôme, Shane Haddad, 24 ans, sort son premier roman Toni tout court aux éditions P.O.L. et Camille Reynaud, 26 ans, publie Et par endroits ça fait des nœuds aux éditions Autrement. Toutes les deux lauréates de la promotion 2020, elles ont obtenu des notes maximales face à un jury d’exception composé d’écrivains et d’éditeurs.

« Leur travail était parfait, d’une grande maturité. Shane a un talent incroyable, une ouverture d’esprit et un sens de la rythmique dans ses mots qui lui est propre », confie le professeur. « Pour Camille Reynaud, il faut savoir que l’ouvrage qu’elle publie aujourd’hui, elle l’a réalisé en première année. Ça montre l’étendue et la justesse de son talent. »

Toutes deux ont eu la chance, par le biais du Master, que leur projet littéraire rencontre le monde de l’édition. « C’est une rencontre où les éditeurs identifient une œuvre qui se distingue de toutes les autres », déclare Frédéric Forte.

 

Le Havre, terre d’inspiration

Des talents qui se concrétisent au Havre et qui souvent y restent. C’est le cas de Shane Haddad, de Camille Reynaud et de bien d’autres.

« La ville du Havre ajoute un plus à leur écriture. C’est une ville qui apporte de la matière et qui imprègne de sa présence les textes des étudiants. Il y a une atmosphère unique dans cette ville de par son architecture, la mer et son cadre de vie », souligne Frédéric Forte. Le Havre comme terre d’inspiration, comme moteur de créativité, la ville écrit elle aussi depuis 2012 sa relation avec la littérature.

« Si le Master continue à être aussi bien reconnu, l’histoire de la littérature havraise va s’ancrer dans le temps. Elle s’est d’ailleurs déjà installée grâce à la présence de ces jeunes écrivains qui sortent du Master », insiste le passionné de poésie. Laboratoire d’architecture moderne, décor de cinéma et paysages impressionnistes, Le Havre est aussi une terre de création littéraire.

 

Rencontre avec Shane Haddad, ancienne élève du Master Création Littéraire, récemment publiée aux éditions P.O.L

À 24 ans, Shane Haddad sort son tout premier roman, « Toni tout court », aux éditions P.O.L. Elle nous raconte comment, à travers cette nécessité d’écrire et sa formation, elle est aujourd’hui devenue écrivain.

Depuis quand avez-vous choisi d’écrire ?

Shane Haddad : Déjà toute petite, j’écrivais de la fiction. Je dirais que c’est une passion et aujourd’hui un choix professionnel. Plus encore, je parlerais d‘une nécessité. En grandissant, j’ai tenu des journaux pour garder une trace de mes idées. J’ai fait une section L dans l’optique d’écrire de la fiction. J’ai continué mes études avec une année de préparation hypokhâgne B/L à Paris, option théâtre. Ça m’a appris à développer mon esprit critique, à développer ma pensée. Mais c’est vraiment le Master Création littéraire qui m’a confortée dans mon envie d’écrire de la fiction. Je voulais quitter Paris, j’ai découvert Le Havre.

En quoi la ville du Havre vous a permis de créer, d’écrire ?

Shane Haddad :  Je n’étais plus en accord avec la vie à Paris d’un point de vue écologique, politique. Quand je suis arrivée au Havre, j’ai su que j’allais y rester. C’est une ville où il y a de l’espace, la mer. Ça répondait à mes attentes pour pourvoir réaliser de longues marches qui sont mon moteur de création et donc également pouvoir écrire au calme. Et puis, il y a ce sentiment de partir à la découverte d’une ville que je ne connaissais pas.

Vous avez étudié à l’ESADHaR au Havre dans le Master Création littéraire. Quelles sont pour vous les qualités de cette formation ?

Shane Haddad : Pour commencer, être dans une formation qui mêle la littérature et les arts est un atout majeur. On étudie le livre comme un objet à travers le prisme de l’art. On réalise des ateliers avec des écrivains qui nous laissent le temps et la place pour s’essayer à l’écriture. Cela nous permet de trouver notre rythme d’écriture. Le plus, c’est également la diversité de courants littéraires que peuvent représenter les différents auteurs qui participent au Master. La formation permet aussi d’échanger en direct avec eux sur leur façon de lire, de penser, d’écrire. C’est une formation où l’on est réuni autour d’un projet commun : écrire. Et pourtant, c’est une expérience individuelle, très personnelle.

Auriez-vous quelques conseils pour les étudiants qui voudraient se lancer dans l’écriture d’un ouvrage ?

Shane Haddad : Ce que m’a appris le Master Création littéraire, c’est qu’il faut savoir s’écouter. Ce n’est pas grave si l’on n’écrit pas tous les jours, il faut se déculpabiliser et trouver son rythme. Cela permet de se faire confiance et donc d’être sincère et juste dans son écriture. Il faut savoir s’aérer l’esprit et ne pas hésiter à échanger avec ses camarades et les intervenants sur les différentes techniques de travail qu’on peut adopter, c’est important de se confronter aux autres modes de fonctionnement.